Décidément, il faudra bien un jour rédiger ce manuel de diplomatique du web, ou plutôt du document numérique, si tant est que ce dernier concept désuet de « document » ait une quelconque validité. Il ne pourra être rédigé sans une partie technique très fouillée, avec des spécialistes du web connaissant à fond « leur » période de pointe intellectuelle ou leur domaine propre (les précurseurs, les ouvriers du html, les experts en base de données… les webmestres des années ’90 et ceux des premières années du XXIe s.). Et malgré cela, la bonne vieille critique à l’ancienne perdurera.
Ainsi. Supposons que, dans cinq cents ans, après quelques catastrophes climatiques et autres désastres alimentaires, épidémiques ou économiques, on ne retrouve plus du XXe s. que des bribes de sources comme c’est déjà le cas pour le XIXe s. -puisqu’il est convenu que de l’énorme production de textes du XIXe s., nous n’avons conservé qu’une infîme partie. Supposons qu’un historien éminent retrouve, parmi les tirages d’imprimante plus ou moins effacés qui composent le fonds d’archives d’un geek quelconque du XXe s., cette photo, sur papier:
Avec pour seule légende: « In-A-Gadda-Da-Oswald ».
Et supposons maintenant que l’original ait disparu…
Quel pied de nez à l’Histoire! La photo de l’exécution du présumé assassin de Kennedy, lui-même abattu par un certain Jack Ruby sous les photographes, travestie en une exhibition d’un chanteur yéyé, par les soins de George Mahlberg en 1996, avec Photoshop et en 40 minutes, paraît-il…
Evidemment, ici, les ficelles sont trop grosses. Mais ailleurs ?
Au-delà de l’analyse technologique elle-même, qui trouvera immanquablement ses limites, seule la critique appliquée des historiens, la critique interne, pourra faire le départ entre le faux et le vrai. Ici, pour « In-A-Gadda-Da-Oswald« , le doute viendrait de l’inadéquation de l’âge et des costumes des musiciens par rapport au chanteur, mais aussi de l’anachronisme probable des synthés Roland dans un décor des années ’60, y compris le cop en uniforme.
Il n’y a décidément que la recherche de la vérité qui m’intéresse.